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Les affiches anciennes

Mis à jour le 17 avril 2020 par Patrick

L’explosion du phénomène de l’affiche dans les pays industrialisés d’Europe a lieu vers les années 1890. Il attirera à l’affiche de nombreux artistes venus d’autres disciplines. Pensons en France aux exemples célèbres de Toulouse-Lautrec ou Mucha, affichistes, l’un du Moulin Rouge de Bruant et de La Goulue, le second des figures hiératisées de Sarah Bernhardt.

Très vite l’affiche sortira de son contexte socio-économique pour devenir un objet d’admiration et bientôt de collection. Les premières expositions ont lieu vers 1890. Le terme « affichomanie » est créé en 1892 et l’engouement pour l’affiche devient général.

Peu de temps après la France, la Belgique allait connaître un véritable âge d’or de l’affiche favorisé par une expansion économique et une activité artistique importantes. En cette fin de siècle, la Belgique est à l’avant-garde de bien des courants artistiques comme le Symbolisme ou l’Art Nouveau, avec Maeterlinck et Horta pour ne citer qu’eux.

Au niveau de l’affiche, qu’il suffise de rappeler les noms de Fernand Toussaint, Emile Berckmans, Auguste Donnay et Armand Rassenfosse plusieurs fois cités ici même.

Spa connaît à ce moment la fin de son deuxième âge d’or, après le glorieux XVIIIe siècle, qui se terminera en 1902 avec la mort de la reine Marie-Henriette et la suppression des jeux. La Ville, cependant, pour combattre le marasme économique qui en résulte, au prix d’un effort gigantesque de huit ans, va transformer une partie de son centre historique en créant un nouveau casino et un nouveau Kursaal. L’affiche spadoise va porter témoignage tout à la fois des belles années de la fin du XIXe siècle, mais aussi du renouveau des années 1905-1910.

Le Musée de la Ville d’Eaux possède une collection de quelque 200 affiches anciennes. Une quinzaine d’entre elles sont visibles dans les salles d’exposition du Musée de la Ville d’eaux et du Musée spadois du Cheval. L’analyse qui suit est celle faite par Jean Toussaint à l’occasion de l’exposition Spa s’affiche (été 2004).

Mis à part le peintre bruxellois Fernand Toussaint, on y découvre peu de signatures connues du grand public. Clarys, Gaudy, Mignot et T’sas, plusieurs fois représentés dans l’exposition, sont, pourtant, de remarquables affichistes. Comme le remarque Luc Aerts dans l’avant-propos de L’Art de l’affiche en Belgique 1900-1980 : « Si le créateur d’affiches peut incontestablement être considéré comme un artiste à part entière, nous constatons qu’il a beau être responsable d’un aspect non négligeable de nos paysages urbains, il n’est pratiquement jamais connu du grand public ».Ce sont là des affichistes bruxellois, édités pour la plupart par la maison De Rycker.

N’oublions pas que l’affiche est tout d’abord une activité de promotion économique et que les commanditaires spadois trouvaient peut-être leur avantage à s’adresser à des entreprises bruxelloises.

A part Victor Renson, dont nous présentons deux affiches, fort jolies par ailleurs, on ne trouve pas d’illustrateur spadois. Or, Spa « disposait » à l’époque de nombreux peintres et décorateurs en Bois de Spa de qualité. Certains sont probablement les auteurs de quelques affiches anonymes comme ce projet, ou cette base d’affiche, représentant une Ardennaise devant la cascade de Coo avec Spa à l’horizon.


Parmi les sujets traités, bien avant la cure, les bains, les sources et le Casino, ce sont les affiches sportives qui dominent. Ce sont des sports s’adressant à une élite, les « sportsmen » : les diverses activités hippiques, la chasse, le tir aux pigeons et le tennis, comme le représente bien l’affiche de Fernand Toussaint "Spa Exposition des Sports", avec ses trois jolies dames tenant l’une une raquette, la seconde une badine d’amazone et la troisième un fusil de chasse sur ses genoux.

Plusieurs affiches sont néanmoins consacrées à des sports nouveaux comme le cyclisme et l’automobile. L’affiche de Georges Gaudy Concours d’automobiles de 1896 est l’une des plus anciennes consacrées au sport automobile. Comme il est dit dans Affiches sportives de Belgique : « Le prince Albert, futur Albert Ier y assista en compagnie de la reine Marie-Henriette, sa tante, et de sa fille la princesse Clémentine. Il y confirma sa réputation de « chauffeur » distingué et son goût pour la mécanique ».


La célèbre affiche de T’sas, consacrée à la "Coupe Pilette" de 1907, et qui se négocie actuellement à des prix extravagants, voit, comme cela se faisait souvent à l’époque, l’annonce de la course intégrée dans l’affiche. De même dans le concours hippique de 1905 du Français Du Passage le programme du concours hippique est adossé à un promontoire que contournent attelages et cavaliers.

Si l’on regarde les prix accordés aux épreuves hippiques et au tir aux pigeons, on trouve souvent des sommes supérieures à 100.000 francs or (en gros 500.000 euros), alors que le cyclisme, les régates du Lac de Warfaaz et même le sport automobile, pourtant pratiqué par l’aristocratie, doivent souvent se contenter de quelques milliers de francs, or, bien entendu !

L’inauguration du vélodrome en 1894 fut cependant dotée de 25.000 francs (125.000 euros). Autre exception, l’affiche "Spa aéroplanes" dotée de 75.000 francs de prix. Deux affiches, enfin, illustrent des sports insolites à Spa, les courses de taureaux et de chameaux.


Certains détails d’affiches sont curieux ou révélateurs. Ainsi cette publicité de l’élixir de Spa composée de vignettes représentant la distillerie, les sources de La Sauvenière et de la Géronstère et un panorama avec le clocher de l’ancienne église, qui permet de dater l’affiche d’avant 1883, où celle-ci fut démolie. La mention, aussi, de la rue Louise, du nom de notre première reine, bien oubliée, pour l’Exposition annuelle des Beaux Arts. Cette rue, parallèle à la rue Léopold de l’autre côté de l’Etablissement des Bains, qui fut supprimée dans sa partie inférieure en 1904 lors des transformations du casino, deviendra par la suite la rue de la Poste.

La publicité de l’Hôtel d’Orange, qui jouxtait l’ancien Casino, l’un et l’autre démolis en 1904, pour créer le casino actuel, montre la jolie façade sud, côté jardin, très rarement représentée.

L’affiche à trois niveaux attribuée à Clarys représentant de haut en bas l’intérieur du Pouhon Pierre le Grand, la promenade Meyerbeer et la place Royale nous montre en fait dans la partie inférieure un premier projet du Kursaal en 1905, quelque peu différent de son état définitif.


L’affiche de Crespin faisant la publicité de la Ferme de Frahinfaz, route de l’hippodrome de Sart, sur lequel a été bâti l’actuel golf indique « déjeuner à la fourchette ». Cette expression, qui n’est plus guère utilisée chez nous désigne simplement,d’après le Dictionnaire Robert en six volumes « un déjeuner (notre dîner) avec de la viande, des mets solides ».

Dernier détail insolite, l’affiche "Ville de Spa – Bataille de fleurs" du 15 août 1894 nous montre des personnages en uniformes défilant sur des grands-bis. Peut-être s’agit-il d’un défilé parodique, le grand-bi étant à l’époque bien passé de mode.

L’affiche de la Belle Epoque exploite, on l’a souvent dit, de façon pléthorique l’image de la femme. L’affiche spadoise d’avant 1914 ne déroge pas à la règle. Les manifestations mondaines qu’elle veut promouvoir se prêtent, d’ailleurs, admirablement à cette utilisation. Fernand Toussaint l’a mieux qu’un autre compris. Gaudy, T’sas et d’autres ont également mis en scène dans leurs compositions de jolies Bobelines. Mais on trouve également, de façon récurrente, généralement en retrait des belles curistes, de fraîches Ardennaises coiffées du barada, la coiffe traditionnelle du pays de Liège.