Le musée vir[us]tuel - 17
La trompe du herdier
La vie en Ardenne était autrefois bien différente. Voici un lointain rescapé de ce temps que les
moins de 120 ans ne peuvent pas connaître : l’instrument de travail du herdier.
Le terme « herde » vient du Vieux-Francique et signifie « troupeau ». Devenu hiède en wallon,
il a également donné herd en anglais et herde en allemand moderne. Le herdier est donc un
berger, un pâtre, un vacher.
Autrefois, il y avait un herdier unique pour chaque village ardennais. Tous les habitants étaient
tenus de mettre leur bétail dans la herde commune. Cet homme ou cette femme, car il y a
eu des hièd’rèsse (!) recevait un modeste salaire. En outre, il était hébergé à tour de rôle
dans chaque famille du village et cela en proportion du nombre de bêtes de chacune d’entre
elles. D’après les archives du 18
e
siècle, cet homme devait être « de bonne réputation et de
probité connue ».
Levé à l’aube, le herdier, muni de sa besace, se présentait au centre du village. Il utilisait alors
sa corne pour produire des sons et prévenir ainsi les différents propriétaires qui détachaient
leurs bêtes. Ces dernières venaient d’elles-mêmes se ranger sur la place du village ou
rejoignaient le troupeau en cours de route. Le herdier les emmenait alors aux pâturages,
toujours par le même chemin, et y restait toute la journée. Le soir, le scénario inverse se
produisait et les appels de la corne avertissaient la population du retour du troupeau. Avec le
recul, c’est un spectacle assez cocasse (voir vidéo).
A Spa, le « chemin de la Herde » existe toujours. Il relie la route de Barisart à la route de la
Géronstère, qui toutes deux mènent à Bérinzenne, « sur la fagne », tandis que le « chemin
des Moutons » monte vers Creppe, autre lieu de
pâture.
Comme son nom l’indique, la corne du herdier
est réalisée en corne, de vache ou de chèvre. Il
faut être quelque peu habitué pour en faire sortir
un son correct. Un très beau dessin réalisé en
sépia par Joseph Body (1799-1873), le père
d’Albin, immortalise un jeune herdier soufflant
dans sa trompe.
Dans son autre main, il tient un bordon a-z-onês
c'est-à-dire un bâton à anneaux. Il s’agit d’un
bâton au bout duquel on laissait une branche
dans laquelle étaient passés deux ou trois
anneaux en métal ; cette branche était recroisée
autour du bâton de façon à ce que ces anneaux
puissent résonner l’un contre l’autre. Le jeune
garçon représenté sur le dessin n’est
probablement pas le herdier en titre mais un
tircerou, un des petits gardiens qui aidaient le
herdier dans sa besogne.
Il existe bien d’autres instruments de ce type de
par le monde, l’erkencho d’Argentine ou le shofar
d’Israël, mais le plus célèbre pour nous reste
quand même l’olifant de Roland à Roncevaux.
Dimensions : longueur : 29,5 cm / diamètre : 7,5 cm
Epoque : 19
e
siècle
Technique : corne (de vache ?)
N° d’inventaire : K0182b
Photographies : MC Schils
Bibliographie :
Body, Albin, La herde au pays de Spa, in XVIIe-XIXe siècles, Ardenne spadoise, 1899.
Marquet, Léon, Histoire et folklore de l’Ardenne d’autrefois, 1981
https://www.sparealites.be/les-bergers-de-la-fagne-de-malchamps
Pour aller plus loin :
https://www.youtube.com/watch?v=YRvogsObj9k (archive filmée du Musée de la Vie wallonne )
© Musées de la Ville d’eaux
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